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5 juin 2019

RÉSEAU DE CHAUFFE BIOMASSE DE LA VILLE DE CHÂTEAU-THIERRY

 

Dalkia et le développement durable des forêts

 

Biomasse et biodiversité sont-elles toujours compatibles?

 

- La Ville de Château-Thierry,  par délégation de service public, a confié à Dalkia (filiale d'EDF) la création et l'exploitation d'un réseau de chauffe biomasse.

 

" La chaufferie installée sur la zone d'activités de La Moiseríe consomme par année 20 000 tonnes de bois - cette quantité ira en augmentant les années à venir - provenant d'un bassin d'approvisionnement situé dans un rayon de 50 km autour de Château-Thierry ". (mairie de Château).

 

"Une plate-forme de stockage des bois est mise en place sur la Commune de Lucy-le-Bocage. (vuduchateau,com).

 

"La biomasse utilisée est constituée à 90 % de plaquettes forestières et à 10% de bois d”élagage ". (mairie de Château).

 

"La biomasse est considérée comme une source d°énergie renouvelable si sa régénération est au moins égale à sa consommation ".

"Elle n'est énergie renouvelable que si elle ne bouleverse pas les équilibres naturels ".

"Pour le bois énergie, s'il y a surexploitation de la ressource, on ne peut pas considérer la biomasse comme renouvelable car on puise alors fortement dans le capital forestier de nos territoires, ce puits de carbone qui permet de piéger du CO2 dégagé ; si l'on entame ce capital,non seulement on appauvrit la ressource, mais on entre dans un bilan carbone négatif comme cela se passe avec les énergies fossiles". (Natura-Sciences, mise à jour du 26/03/2018).

 

"Les plaquettes forestières, comme bois énergie, transmises et brûlées en chaufferie, sont constituées de bois déchiquetés sur place ou sur lieu de stockage, provenant de «résidus forestiers ›› dits «non valorisés» (hors bois d'œuvre et bois d'industrie), composés de billons ou rondins, dits de «bois courts ››, de houppiers et grosses branches d'arbres, d'arbustes et taillis, voire de haies, de souches, de racines ›› (définition internet).

 

- La filière bois, devant trouver la matière nécessaire au fonctionnement de la chaufferie de Château-Thierry, est organisée par la filiale Dalkia - Bois Energie Nord Ouest qui est censée respecter et faire respecter par les exploitants forestiers travaillant pour elle les spécificités de la "certification PEFC" assurant le "développement durable des forêts".

 

"Le développement durable des forêts a pour objet de gérer les espaces et les ressources de manière à pouvoir répondre aux besoins présents, sans compromettre ceux des générations futures et sans nuire à la diversité écologique".

 

" Une forêt gérée durablement est une forêt :

  •  qui respecte et maintient sa biodiversité.
  • dont les sols et les eaux sont préservés.
  • qui est en bon état sanitaire et se renouvelle.
  • qui bénéficie à toute la société (ressource en bois, puits de carbone, lieu de promenade) ›› (définition internet).

 

"La certification PEFC fixe des règles de gestion et donc d'exploitation préservant la forêt pour l'avenir, fait appliquer ces règles et vérifie leur bonne application, garantit le respect des exigences fixées" (définition internet).

 

- Le bilan CO2 nul revendiqué par la Ville de Château-Thierry pour le système de chauffe biomasse ne correspond pas à la réalité, puisque la combustion des bioénergies libère du dioxyde de carbone, certes absorbé par les végétaux lors de leur croissance, mais ces derniers ne peuvent plus produire de l'oxygène car abattus.

D'autre part, leur renouvellement naturel n°est pas systématique lorsqu'on réalise des « coupes à blanc ›› ou des « coupes rases ›› pour ne replanter que des essences à croissance rapide (peuplier par exemple ou résineux) obéissant à la seule règle d'une exploitation productiviste c'est-à-dire commerciale à court terme.

 

Qu'en est-il, par ailleurs, du bilan carbone de l'abattage des produits forestiers, de leur transfert en lieu de stockage, de leur broyage pour en faire des plaquettes forestières et du transport de celles-ci à la chaufferie ?

 

- On part trop souvent du principe que tout ce qui n”est pas considéré «valorisé ›› (bois d'œuvre et bois d'industrie) dans l'exploitation forestière, à savoir les «résidus forestiers ›› ou << rémanents ››, peut être utilisé pour alimenter la chaufferie du réseau de chauffe biomasse et que l'on peut laisser des parcelles initialement boisées nues de toute végétation et tant pis pour la flore et la faune qui s'épanouissaient en des lieux de richesse écologique.

 

- On n'a jamais autant constaté de "coupes rases " ou " coupes à blanc " ces dernières années dans notre secteur, en forêt comme pour de plus petits espaces boisés.

On peut voir fréquemment des engins forestiers broyant tout sur leur passage sans discernement ; les constats de nombreux observateurs en témoignent.

La surexploitation des espaces boisés entraîne un appauvrissement de la biodiversité ; la flore, la faune, particulièrement l'avifaune, en sont les premières victimes et à terme l'humain.

On pourrait évoquer aussi l'aspect de désolation résultant de la façon dont certaines coupes sont effectuées avec en sus tassement du sol et dégradation des chemins.

 

"L'intensification des prélèvements, tout ce que l'on appelle les « rémanents ›› et notamment le menus bois de diamètre inférieur à 7 cm, éventuellement même étendu aux souches d'arbres, peut entraîner sur certaines sections une perte de fertilité du sol due à l'exportation d'éléments minéraux, notamment de calcium ; le phénomène d'acidification, du sol, en raison d'un déséquilibre ionique au niveau de l'alimentation racinaire, est compensé par la décomposition de la litière et l'altération minérale par la libération d'éléments nutritifs ; tout enlèvement excessif de l'ensemble des produits forestiers d'une zone boisée va créer un déséquilibre et générer de l'acidité ; les sols vont donc se dégrader et devenir de moins en moins productifs et il faudra alors avoir recours aux intrants, pesticides et fertilisants pour maintenir une production au niveau du marché ›› (Ponge J. F. Muséum d'Histoire Naturelle).

 

"Cette situation, ajoutée aux incitations faites auprès des propriétaires forestiers pour une gestion à court terme sera très préjudiciable à la biodiversité forestière car de nombreuses espèces de la flore et de la faune ne trouveront plus sur place les éléments de leur existence"

 

"On est en train de passer d'une vision protectionniste de l'environnement à une vision utilitariste qui sera catastrophique pour les générations futures" (Muséum National d”Histoire Naturelle - impact rémanents sur biodiversité forestière 20 Mars 2013 Ponge Jean-François).

 

- Par ailleurs, on ne peut que déplorer les réalisations de coupes forestières ou simple abattage de bosquets en pleine période de nidification des oiseaux comme cela se produit bien trop souvent alors que la baisse des effectifs des espèces de l'avifaune est spectaculaire, quand certaines ne disparaissent pas totalement ; cette pratique est irresponsable.

 

La période de reproduction des oiseaux s'étale globalement de mars à la mi-août ; c'est un moment crucial pendant lequel ils sont vulnérables ; les opérations de taillage, d'élagage et d'abattage d'arbres et de haies sont particulièrement préjudiciables pendant cette période puisqu'elles entraînent dérangement et destruction directe des couvées.

 

La Directive Oiseaux du 30 Novembre 2009 impose une protection stricte de tous les oiseaux sauvages pendant leur période de reproduction (Code de l'Environnement) et rend délictuels les travaux forestiers effectués durant cette période lorsqu'ils impactent des espèces de l'avifaune protégées par la loi ce qui est le cas de la plupart des passereaux.

 

Pour toutes ces raisons. l'utilisation de la biomasse et la protection de la biodiversité ne sont pas toujours compatibles.

 

- Les mesures prises en faveur de la transition écologique comme l'utilisation de la biomasse en tant que source d”énergie ne doivent pas s'exercer au détriment de l'indispensable lutte contre la dramatique érosion de la biodiversité alors que « nous sommes entrés dans la sixième extinction de masse des espèces et la première provoquée par les activités humaines ›› ( experts scientifiques de l'ONU - IPBES rapport sur la biodiversité ).

 

Dalkia et sa filière Bois Énergie certifient respecter les spécificités de la certification PEFC propre au développement durable des forêts.

 

J'ai sollicité de chacune de ces deux structures qu”elles expliquent concrètement en quoi l'action menée permettant l'alimentation en biomasse de la chaufferie de Château-Thierry correspond à leur engagement relatif au développement durable,

 

si les abattages et ramassages des produits forestiers qu'elles pilotent caractérisent bien la nature d”une biomasse source d” énergie renouvelable dont la régénération est au moins égale à sa consommation,

 

si elles contrôlent. comme cela devrait ainsi se faire, le travail effectué pour leur compte par les exploitations forestières censées être en phase avec la notion de développement durable.

 

Aucune nouvelle de Dalkía ni de sa filiale pour apporter des réponses circonstanciées;

on peut craindre que la notion de « développement durable des forêts ›› ne soit que du vent.

On constate qu'il y a souvent loin des déclarations d'intention à la réalité des faits.

 

Christian VACHER. (Mai 2019).